• Du MAL radical (suite)

    Je voudrais avant de continuer sur le sujet du précédent article (titré "le Mal radical") préciser une chose : il n'est pas question ici de céder aux tendances de l'époque et de me poser en "petit saint", ou en "belle âme bien propre" qui vient geindre sur la méchanceté de ses contemporains. Et, pendant que j'y suis, je rappelle (mais tous ceux qui lisent encore ce blog doivent évidemment le savoir) que l'idéalisme philosophique dont nous nous réclamons ici, à la suite de Brunschvicg et Husserl , n'a rien à voir avec ce que l'on signifie généralement par ce mot "idéalisme" (à savoir le discours de quelqu'un d'un peu niais, qui croit encore que les grand idéaux humanitaires vont gagner incessamment sous peu et que demain on rasera gratis et que ma belle voisine me roulera des pelles dans l'ascenseur)......

    les Alcooliques anonymes ont une belle formule à ce sujet : ils se caractérisent comme "des idéalistes en faillite".

    Comme quoi on peut toujours s'en sortir... allez vite rassurer Robert Ménard Mort de rire

    L'idéalisme, sous la version métaphysiquement  "minimaliste" que nous adoptons ici, cela consiste simplement à reconnaitre que c'est l'esprit qui a le pas sur tout le reste (s'il y en a...et il y en a , sinon nous tomberions dans l'idéalisme à la Shankara revisité par  "neuneus blog"); ce n'est rien d'autre que la façon de voir de Descartes, puis de Kant, ainsi d'ailleurs que du Dhammapada bouddhiste qui commence par "Le mental est avant-coureur des phénomènes".

    Non je ne suis pas une belle âme, je ne suis pas , hélas, un homme bon, loin de là... et il n'y a rien d'étonnant à cela, car je tiens, comme je l'ai je crois déjà dit, que les gens vraiment bons (c'est à dire capables de l'amour absolument désintéressé, de l'amor intellectualis Dei) sont très rares...ce qui est difficile est rare. Pour être vraiment "bon" il faut avoir parcouru tout le chemin philosophique décrit par Spinoza ou Brunschvicg, ce qui est très difficile et réclame le travail acharné de toute une vie (à condition de commencer tôt, et de ne pas perdre des années dans la triste quête de l'amour, ou, ce qui revient au même, du sexe, ou de la richesse, ou des vacances, et autres "divertissements"). Et c'est un corollaire de ceci que ceux qui "paraissent bons" (les religieux, les "bonnes âmes" chrétiennes ou autres) ne le sont pas réellement (bien qu'ils ne le sachent pas) . On a vu d'ailleurs il y a 65 ans ce qui se cachait derrière l'amour chrétien universel...mais bien entendu, "cela n'engage que moi" (comme on dit encore aux Alcooliques anonymes).

    Pour reprendre la formule d'un célèbre imbécile avec qui j'ai eu des démêlés dans le passé (l'animateur "spinoziste" tendance Constantin Brunner des forums et blogs "Philosophie contre superstition" http://philosophiecontresuperstition.over-blog.com/ ) : "je n'ai rien à vous vendre". Mais moi je le dis sérieusement Clin d'oeil

    Puisqu'encore une fois j'ai cédé à la détestable tendance qui consiste à parler de soi même, je  commencerai à attaquer le vif du sujet en soulignant une tension , qui a pris pour moi une importance toute particulière mais qui possède un sens universel, entre deux livres, deux très grands livres, très différents d'ailleurs : la nouvelle de Dostoïevsky "Le sous-sol", et le roman "hermétique" de Thomas Mann : "La montagne magique".

    Dans le "Sous sol", qui a été appelée par un critique "une dissection du démoniaque", Dostoievsky met en scène un anti-héros de la Russie du 19 ème siècle, une sorte de "nihiliste" précurseur des bolchéviques : petit fonctionnaire médiocre et méprisé de tous, il rencontre une prostituée au grand coeur comme Dostoievsky savait en dépeindre, qui tombe amoureuse de lui... mais lui , par peur, par sentiment de n'être "pas à la hauteur de cet amour", et aussi par pure méchanceté, détruit cette pauvre âme naïve en lui jetant de l'argent alors qu'elle lui avait donné son amour...Horreur ! ce qui est intéressant c'est qu'au cours de leur dernier dialogue il lui avoue la vérité sur lui même :

    "je ne peux pas...être bon".

    Comment pourrait on ne pas être bon, si l'on veut réellement l'être ? quand on veut, on peut...comme dirait ce crétin de Sarkozy, qui est tout à fait à sa place à la messe le dimanche matin, il doit même avoir quelques polissonneries à se faire pardonner en confession... un c(h)réti(e)n moderniste, dirons nous !

    eh bien non ! il faut vouloir être bon !

     bien sûr, ce n'est que le premier pas, et ce n'est pas donné à tout le monde (tout le monde se croit bon, donc peu le veulent, le désirent réellement, car on ne peut désirer que ce qui nous manque) mais cela ne suffit pas; le "bien" est médiatisé par le vrai, le "devenir bon" passe par le chemin ardu (philosophique) de la recherche de la vérité... et comme disait notre Maitre Satan dans le grandiose poème de Milton :

    "Long et difficile est le chemin qui de l'enfer conduit à la lumière"

    "Le sous-sol" se termine sur le monologue du triste sire qui en est le "héros", qui là encore nous livre la vérité sur lui même son époque (et l'on comprend qu'il ne pouvait en sortir que la révolution bolchévique et ses horreurs ) : qu'est ce que vivre ? nous ne savons plus ce que c'est que la vie, où ça se niche....nous voulons naître désormais directement de l' esprit, plus d'un père biologique....

    et il termine par "je ne veux plus faire entendre ma voix souterraine"

    et Dostoievsky ajoute : "l'auteur n'a pas pu être fidèle à sa promesse, il a repris la plume... mais il nous semble à nous aussi qu'on peut s'arrêter ici".

    Je pourrais me reconnaitre dans bien des traits du triste personnage du "Sous-sol", et dire moi aussi : "je ne peux pas être bon"... si toutefois je suis sincère !

    Dans la "Montagne magique" de Thomas Mann, le personnage central est un jeune étudiant (se destinant à devenir ingénieur) un peu benêt , Hans Castorp, qui, venant visiter pour 3 semaines son cousin malade au sanatorium de Davos au cours de l'été 1907, se découvre un "talent pour la maladie" sous la forme d'une tache humide au poumon : il restera finalement 7 ans, jusqu'à l'été 1914, au sanatorium, une période "hermétique" au cours de laquelle il sera soumis aux grands dangers de la "séduction de la mort et de la maladie" , mais finalement il trouvera son "salut" et un "songe d'amour" le visitera, impulsé par le charme "asiatique" de la belle russe Clawdia Chauchat. Et Thomas Mann laissera son héros, ce brave enfant gâté de la vie, sous le déluge de feu et de boue de la guerre, le livre finissant par : "l'Amour s'élèvera t'il un jour ?"

    Bonne question !

    Mais l'épisode central et "initiatique" du récit est à mon avis la promenade à skis solitaire de Castorp au cours de laquelle il est pris dans une tempête de neige et manque de peu de mourir ; sous l'effet du froid, de la peur, de la faim et disons le, aussi du porto, il a deux "visions", l'une dionysiaque et effrayante (une vieille femme qui dévore des enfants) , l'autre apollinienne (de beaux jeunes gens nus se promènent enlacés sur la plage et se récitent de beaux poèmes) et fait alors un "choix" pour la vie, une décision spirituelle qui s'énonce ainsi :

    "Je veux être bon"

    sauvé !

    Telle est la tension dont je parlais plus haut ...

    Hans Castorp représente la "voie médiane" , écartelé qu'il est, ce brave enfant bourgeois gâté par la vie , entre les deux autres personnages qui tentent de prendre l'emprise sur lui :

    - Settembrini, le "révolutionnaire garibaldiste" qui représente l'idéal des Lumières, et n'a de cesse d'inciter Castorp à quitter la sanatorium, ce "chaudron des sorcières", pour retourner dans la plaine et devenir un ingénieur utile à ses semblables, loin des "séductions de la mort et de la maladie"... et  il le mettra en garde aussi contre les charmes de l'Asie, ceux de Clawdia la belle russe : "c'est l'Asie !" ....

    - Naphta le jésuite, qui représente la tentation "réactionnaire" de retour (régression) aux temps d'avant les Lumières, où "tout venait d'En Haut"

    à la fin les deux , Settembrini et Naphta, se battront en duel : le sort désignera l'italien pour tirer le premier, mais il refusera de tuer un homme et tirera en l'air... Naphta lui crachera alors son mépris à la figure ("lâche !") et se suicidera devant lui !

    Il n'est pas difficile de voir que Naphta conduit au nazisme, Settembrini au capitalisme mondialisé d'après guerre, et le triste sire du "Sous sol" au bolchevisme ....

    telles sont les trois composantes du Mal (non absolu puisque j'ai montré que cette notion est inconsistante) mais "radical" qui nous accompagnent ici et maintenant, à quelques variations près : la principale étant que le nazisme a évidemment disparu, j'ai dit qu'il a "mué", en fait il me semble qu'il se répartit en les trois composantes réelles du Mal qui nous entourent  actuellement, nous les vrais Européens : Islam, capitalisme "occidental" mondialiste, et reliquats du communisme et ce qui va avec (gauchismes, etc..). Mais évidemment cette répartition n'est pas symmétrique, c'est évidemment l'Islam (et non un prétendu "islamisme") qui hérite de la façon la plus visible de la violence démente et totalitaire du nazisme, comme l'ont montré des livres comme "Le croissant et la croix gammée", et comme en témoigne le fait bien connu que des officiers nazis dirigeaient en sous-main l'offensive arabe contre l'Israel naissant en 1948

    Moi aussi je pourrais dire à ce stade que "je ne veux plus faire entendre ma voix souterraine"... mais j'ai bien peur que pas plus que par le passé (j'ai créé déjà bien des blogs comme celui ci) je ne sois fidèle à ma résolution....

    cet article aura donc sans doute une suite


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