• Le cinéma est mineur parmi les arts, et les arts sont mineurs par rapport à la science, tout au moins en ce qui concerne la pensée, en ne retenant donc de ce que les contemporains appellent "science" que les théories de pensée pure (dont l'archétype est la théorie de la relativité générale).

    Mais certains films ont cet intérêt qu'ils "cristallisent" en quelque sorte ce qu 'on doit retenir d'une époque, et "No country for old men" est de ceux là : la critique a pour une fois raison, il s'agit du meilleur film "noir" des frères Coen, parce qu'on n'y trouve plus ces fioritures agaçantes qui abondaient dans les précédents.

    Mais là où les critiques (en tout cas ceux que j'ai lus sur le web, et je suis loin d'avoir tout lu) font fausse route c'est quand ils restreignent la portée du cinéma des Coen à la "dénonciation" d'une certaine Amérique : leurs films se passent aux USA parce que c'est le pays qu'ils connaissent le mieux, forcément, mais on ne peut leur nier une portée universelle.

    "No country for old men" se passe au Texas au début des années 80, tout comme "Blood simple" dont c'est une sorte de "remake", mais avec une histoire toute différente, et un art bien plus consommé. Or si l'on veut bien se rappeler le début de "Blood simple" (le monologue du détective privé criminel), il y est fait allusion au Texas en relation avec le communisme et l'URSS, la guerre ffrodie faisait encore rage à l'époque, politiquement, militairement mais aussi culturellement.

    Pourquoi les années 80 ? pour la raison qui vient d'être dite (une portée universelle, touchant à l'affrontement communisme-capitalisme du point de vue du destin de l'humain), mais aussi parce que c'était l'époque de la série "Dallas" (ou l'époque immédiatement ultérieure), cette fameuse série qui est pastichée sur le mode de la dérision dans "Blood simple" , et qui par paraboles interposées est l'un des facteurs (modeste ? important? qui le dira ?) de la " victoire" planétaire apparente du "modèle capitaliste américain".

    Et puis, last but not least, il faut absolument que l'intrigue de "No country for old men" ait lieu dans un passé à la fois immédiat et complètelment révolu, exactement comme celle de la "Montagne magique" de Thomas Mann à l'époque d'après guerre où il l'écrivait. Et pour les mêmes raisons...

    car de même que ""La montagne magique" est un livre sur le Temps envisagé dans sa nature hermétique, "No country for old men" est un film sur la "transmission" des "valeurs", c'est à dire sur l'arrêt brutal de toute transmission... un film sur le nihilisme contemporain donc. encore un dira t'on... eh oui ! le cinéma ne sait plus et ne peut plus faire que ça...c'est cela son caractère "mineur"... bien entendu je ne parle pas ici d'Astérix aux jeux olympiques, mais du "grand cinéma", et celui des frères Coen en fait partie...

    Les personnages font honneur à leurs prédecesseurs de la série "Dallas" : une brochette d'imbéciles sans aucun intérêt propre (mis à part le shérif fatigué, joué par l'excellent Tommy Lee Jones). Le "cow boy" joué par Josh Brolin, qui tombe par hasard sur le lieu d'un massacre en plein désert entre trafiquants de drogue et sur un magot de 2 millions de dollars qu'il pense pouvoir voler sans léser personne représente le "sommet" de cette galerie : c'est un soudeur qui n'est même pas incompétent professionnellement ("donnez moi quelque chose à souder, je le soude") , ancien du Vietnam, ignoble personnage qui interrompt sa femme par ces paroles : "si tu ne te tais pas, je t'emmène dans la chambre et je te baise ("I screw you") "... eh oui ! il faut le faire !).

    il partage avec quelques autres le ridicule de croire pouvoir "régler ses problèmes tout seul et affronter l'adversité sans peur" ; il passe ainsi tout le film à montrer ses biceps, et à rencontrer des gens qui le préviennent que tout ceci va mal se terminer pour lui, ce dont le spectateur est intimement convaincu. Et effectivement cela se termine mal pour lui.

    Que dire du "tueur psychopathe" ? c'est un invariant chez les Coen que d'incarner le "Golem" dans un des personnages, et c'est lui qui joue ce rôle...mais ici il possède une signification propre. Lui aussi passe son temps (il le remarque d'ailleurs explicitement) à rencontrer des personnages qui lui disent : "vous n'êtes pas obligé de faire ça", et ils lui disent généralement ça avec de la terreur dans les yeux, car il braque alors son fusil sur eux et est sur le point de les tuer. Et sa réponse est invariable : tirer une pièce de monnaie de sa poche et jouer leur vie à pile ou face... on l'aura compris : il symbolise l'impossibilité d'accéder à la liberté, de par son refus de prendre une décision libre de laisser l'autre en vie.

    Et d'ailleurs rien ne semble  pouvoir l'arrêter, et surtout pas le "cowboy soudeur" qui certes le blesse, mais se fera tuer quand même... seul à la fin le "hasard" (qui comme on le sait depuis Cournot est la "rencontre de deux séries causales indépendantes") sous la forme d'un accident de voiture, mais là encore il en réchappe...

    Ce sont évidemment les "rêves" racontés par le shériff lors de la dernière scène qui livrent la signification et l'intention profonde des Coen , une intention évidemment très pessimiste : il "rêve" la transmission des valeurs par son père, sous la forme d'argent ou de "feu" qui a la semblance de la lune, manière poétique d'évoquer le judaïsme, mais justement ce n'est qu'un rêve, et il s'éveille pour se retrouver en notre monde plongé dans le noir et le froid . Un monde où le christianisme (de la liberté et de l'amour "universels" ) est définitivement impossible, et c'est bien là la seule "victoire" que pouvait enregistrer l'Ancien testament sur le nouveau, mais celle ci est pleine et entière.

    Un monde donc où aucune vérité "messianique" ne viendra se "réaliser" en une épiphanie universelle, un monde définitivement désacralisé, où plus aucune "valeur" ne peut être un refuge contre la violence et la folie qui se donnent libre cours. Un monde qui n'en est pas un, le monde de la "globalisation" et de la "victoire" du modèle capitaliste occidentale, justement au début de l'ère Reagan qui est cette époque où se passe le film... un monde qui a pu être caractérisé comme celui de la "surexposition" de tous aux yeux et aux atteintes de tous. Un monde cahotique d'avant la véritable "création" du monde.

    Ce que le cinéma des frères Coen suggère aussi, s'il ne le dit pas explicitement (mais est possible de "dire explicitement" dans un film) c'est que si cette transmission s'est arrêtée, c'est peut être qu'il n'y avait rien à transmettre vraiment ? car le temps où il y avait encore des "valeurs", cela nous fait remonter assez loin en arrière, quelques siècles tout au moins, et donc en dehors du cadre purement américain, s'il en fallait encore une confirmation. C'était le temps où le monde n'était pas encore "désenchanté", où la religion et la communauté voulaient encore dire quelque chose, où la Terre qui est notre planète et son système solaire n'étaient pas perdus au milieu d'un océan immense de galaxies, mais étaient au "centre du monde" créé par Dieu pour l'homme, au milieu des septs sphères planétaires mûes par les Intelligences célestes.

    Et nous atteignons ici aussi la limite de ce que l'art mineur "cinéma" peur nous apporter : il ne peut plus que tourner à vide tel un disque rayé, sur la dernière chanson enregistrée qui a pour nom "nihilisme", et qui ne sera suivie par aucune autre...

    ce qui vient après,  les tâches futures, celles qui doivent assurer la substitution d'un nouveau testament à l'ancien (et là on comprendra que je parle dans un tout autre registre que celui du religieux, où justement le "nouveau" est incapable de remplacer l'ancien) , ce n'est plus du ressort du cinéma en particulier ou de l'art en général....


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  • Marcel Gauchet (il me semble) a caractérisé le christianisme comme "religion de la sortie de la religion". Dans le même ordre d'idées Kojève affirmait que seul le monde chrétien pouvait accéder à la vérité ultime qui est l'athéisme.

    Mais ne peut on pas déceler dans la modernité une sortie hors du christianisme ? si bien sûr, si l'on en croit les sociologues qui annoncent en Occident une tendance lourde à la sécularisation et à l'athéisme (ou à la mécréance selon Bernard Stiegler). ainsi même parmi ceux qui se disent chrétiens, une bonne partie ne croit plus à l'existence de l'âme, ni à la Résurrection du Christ, encore moins des corps, et quant au jugement dernier....c'est tous les jours qu'il a lieu, à Wall Street ou à la bourse de Paris...

    cette sortie hors du christianisme prend comme visage le capitalisme mondialisé qui est notre "destin", si l'on en croit nos modernes clercs (tous économistes). Il s'agit donc d'une nouvelle religion , une religion à "transcendance", celle ci se nommant tour à tour développement, croissance, démocratie, globalisation etc...il s'agit bien d'une transcendance parce qu'aucun débat  à son sujet n'est admis. Tout débat est possible en démocratie, sauf le débat pour savoir si la démocratie est bonne ou non : ceux qui iraient contre s'excluent du débat "civilisé". Et la démocratie, cela va avec la crosisance, l'ouverture des frontières, la mondialisation. Comme disait Thatcher : "There is no alternative" (= T. I. N. A. ). J'aimerais bien passer une heure avec elle, cette Tina, histoire de lui montrer de quel bois je me chauffe...son prix sera le mien !

    Nous avons donc avec le capitalisme mondialisé (tout aussi bien que mondialisateur) la religion de la sortie de la religion de la sortie de la religion. Mort de rire

    Mais cette sortie en est elle bien une ? il semble que non ! on n'en sort pas et on ne s'en sort pas, des religions, et la meilleure preuve en est que les apôtres du libéralisme et du capitalisme le plus dur sont aussi ceux de la religion sans aucun frein, que les plus malins (ou les plus cons, c'est pareil) nomment "laïcité positive", croyant tromper leur monde : ainsi les USA, pays très religieux et très libéral et "dérégulé", l'Angleterre, la France depuis l'avènement de Sarkozy. On sait aussi que les régimes islamiques les plus intégristes, parmi les pays du Golfe, s'accomodent très bien du capitalisme le plus débridé, et de l'exploitation éhontée de leurs travailleurs immigrés , sans que les grandes consciences humanitaires occidentales ne s'en alarment beaucoup... sans doute sont ils déjà trop occupés à défendre les pauvres sans papiers d'Europe.

    La religion moderne, qui "relève" et coiffe toutes les autres (au poteau) en les réunissant sous sa coupe, le "monothéisme du dollar" comme disait Garaudy , semble aussi renouer avec les antiques sacrifices humains des Molochs , Baals, et autres dieux sanguinaires. Comme le disait Lacan parait il, le capitalisme est efficace, trop efficace...il marche si bien qu'il dévore tout, et pour finir s'autodévore. Et elle ne réunifie vraiment ni les hommes, ni les peuples, ni les autres religions, puisqu'elle met tout le monde en concurrence et en "choc des civilisations" , même si les bons apôtres nient farouchement ce dernier fait, clamant sans arrêt la nécessité de la tolérance, du multiculuralisme... mais ce multiculturalisme, cet "amour universel" ne peut longtemps cacher sa face hideuse de multiracisme et de guerre de tous contre tous.

    Il est donc nécessaire d'en sortir, vraiment cette fois, et donc d'envisager une religion qui serait la religion de la sortie de la religion de le religion de la sortie de la religion  ! Mort de rireMort de rireMort de rire.

    Une religion qui enfin relierait les hommes, et assurerait donc l'unité du genre humain qui est d'après Brunschvicg (dans "Introduction à la vie spirituelle") le plus haut stade envisageable pour la progression de l'humanité, stade après lequel plus rien n'est pensable. C'est cette religion, qui se substituera à toutes les autres en les supprimant (plutôt qu'en les sursumant ou les "relevant") que nous cherchons à définir ici.

    Une telle religion est elle pensable  et possible ? je pourrais répondre qu'elle peut être caractérisée comme "conception scientifique du monde", mais sous une tout autre acception quer celle des philosophes du Cercle de vienne (inventeurs de la formule). mais pour éviter les débats interminables, je ferai usage d'un argument en forme de "pari pascalien" qui je l'espère mettra tout le monde d'accord : oui cette religion est pensable, possible et doit donc être recherchée, parce que si par hasard elle est impossible, alors l'humanité s'autodétruira sous peu. Il faut donc faire le "pari" , à la manière de Pascal, que cette religion du "Dieu des philosophes et des savants" est possible, ce qui veut dire qu'il faut toutes affaires cessantes travailler à la réaliser.

    C'est au nom de ce Dieu, dont je considère l' existence prouvée par ce qui précède, que je condamne de la façon la plus vive les "anciens dieux", à commencer par celui qui précède immédiatement, à savoir le dieu abstrait de la mondialisation financière et économique, et en même temps que lui le "Dieu" du monothéisme abrahamique, qui lui colle de tellement près à la peau que l'on peut se demander s'ils ne sont pas le même dieu unique (en quatre exemplaires plutôt que les trois connus depuis lontemps ).

    J'ai caractérisé, peu avant les élections françaises, le "sarkozysme" comme l'alignement de l'exception française sur le fonctionnement anglo-saxon, libéral et dérégulé. Le rapport Attali sur la "libération de la croissance",  dont des versions piratées sont parues et ont été commentées dans la presse, ne me démentira pas. Il s'agit d'une ode (fort peu poétique) aux poncifs les plus éculés de l'ancienne religion (qui est encore celle de tout le monde hélas) : libéralisation, liberté de travailler plus, mise en concurrence de tous contre tous pour la plus grande gloire du dieu profit, dérégulation. J'en extrais ce passage tiré de la proposition 247 qui ne vise rien de moins que le démantèlement des services publics français, en prenant explicitement comme modèle l'exemple britannique :

    "Développer des agences pour remplir les missions opérationelles des prestations de service.

    Plusieurs dizaines de structures coexistent aujourd'hui en France sous la dénominsation d' « agence », au statut juridique et au fonctionnement très différents : par exemple l'Agence de l'eau, l'Agence France Trésor, l'Agence des participations de l'Etat, etc. Il s'agit soit d'établissements publics administratifs, soit d'établissements publics à caractère industriel et commercial, soit de groupements d'intérêt public, soit enfin de services à compétence nationale : tous disposent de prérogatives très différentes et d'une autonomie de gestion très variable selon les cas. Par exemple, certaines assurent à la fois les missions de conception et de mise en œuvre de la politique dont elles ont la charge. D'autres se limitent à la stricte mise en œuvre de politiques publiques arrêtées au niveau ministériel.

    Au Royaume-Uni, le développement des agences a permis à la fois de moderniser le statut de la fonction publique et de décentraliser la responsabilité en matière de recrutement et de négociations salariales. Ces agences ont ainsi permis de moduler la gestion des ressources humaines à l'aune d'objectifs et de cibles de performance, fondés sur la base d'indicateurs objectifs. Les agences ne sont donc en rien une étape vers la privatisation du service public : elles sont avant tout une façon de mieux le gérer, et donc d'en assurer la pérennité.

    La France doit suivre cet exemple : le gouvernement nommera les directeurs des agences. Il leur fixera des objectifs chiffrés et en contrôlera les résultats. En particulier, le partage des responsabilités, le processus d'allocation des ressources et la gouvernance seront très clairement précisés dans un contrat d'objectifs signé entre le ministre concerné et chaque agence, ce qui permettra un contrôle de cette dernière et une responsabilisation de ses dirigeants sur la base des résultats obtenus.

    Pour exercer ce contrôle, un « conseil de surveillance » pourra être mis en place au sein de chaque agence. Il devra compter en son sein des représentants des usagers, de façon à ce que la qualité du service final puisse être pleinement prise en compte dans le contrôle de la réalisation des objectifs. Le directeur d'agence pourra venir indistinctement de l'administration ou du secteur privé. Il devra réponde de la réalisation des objectifs devant son autorité de tutelle, avec une rémunération en partie indexée sur les résultats.

    La mise en place d'agences n'implique pas de créer un nouveau statut juridique. Au Royaume-Uni, les agences, qui emploient 77% des fonctionnaires du pays n'ont pas la personnalité morale. Aussi, il n'est pas proposé d'élaborerun modèle juridique unique, ni même de créer une catégorie nouvelle de personnalité morale.

    Les agents actuels auront le choix entre la conservation de leur statut de droit public et un nouveau contrat, de droit public ou de droit privé, selon les fonctions et responsabilités de l'agence. Les nouveaux agents seront embauchés sous ce nouveau contrat ou sous le statut de la fonction publique, selon la décision des responsables de l'agence, en fonction de l'intérêt des usagers.

    Des agences pourraient être créées pour :

    • La gestion de l'impôt
    • La tenue de la comptabilité publique
    • Le conseil et l'assistance aux entreprises de moins de 20 salariés
    • L'INSEE
    • La protection civile
    • L'administration pénitentiaire

    Dans un second temps, ce dispositif pourrait être étendu à la gestion des principaux services sociaux en incluant les partenaires sociaux au conseil de surveillance.

    Pourrait également être envisagé de regrouper en Agence tous les intervenants de la formation professionnelle, de la politique du logement ou de la politique de la ville."

    Nietzsche disait que contre le prêtre on n'a pas des raisons, mais des maisons de correction; je dirai de même que contre Sarkozy et ses "rats" (Badiou désigne ainsi les félons de la "gauche" qui sont passés de l'autre côté pour l'attrait de la soupe, comme Kouchner, Attali, Lang, Rocard, Strauss-Kahn et bien d'autres... sans compter que ces "rats" ont au moins eu le courage d'assumer leur saloperie, tandis que d'autres en rêvent la nuit Mort de rire) on n'a pas des arguments, on a des fusils mitrailleurs.

    Mais, coïncidence ou providence ? Mort de rire un magnifique film sorti tout récemment de Ken Loach  : "It's a free world" vient en quelque sorte donner la réponse au galimatias mental de la commission Attali, et notamment à ses propositions ignobles (je pèse mes mots) d'augmenter considérablement l'immigration de travail afin de relancer la croissance et de payer les futures retraites.

    Ainsi le cynisme le plus éhonté des apôtres du dieu cash-flow ne se cache même plus derrière le paravent humanitaire. Il s'agit d'inciter un nombre conséquent d'immigrés du tiers monde à venir s'installer en europe pour combler le "déficit prévisible de main d'oeuvre à moyen terme" en Europe , qui est de 20 millions d'individus.

    Appelons un chat un chat : il ne s'agit plus d'immigration libre, il s'agit de déplacement forcés (oh pardon...incités) de populations.

    mais qui se soucie ici du sort du monde commun ? car si ces immigrés ont une qualification, les faire venir en Europe en privera leur pays d'origine, qui continuera à s'enfoncer dans la misère. Et s'ils n'ont aucune qualification, alors ils viendront faire concurrence à la grande masse déjà présente des "travailleurs sans qualifications" nés en Europe (grâce aux vagues précédentes d'immigration non régulée) et  qui émargent au chômage et à l'aide sociale, ceci dans un pays où la dette publique inquiète à juste titre tout le monde.

    Le film de Ken Loach , réalisé après une enquête minutieuse dans le milieu des "travailleurs clandestins " au Royaume Uni, montre le sort affreux qui attend ces travailleurs , sans aucun droit et obligés à travailler 14 heures par jour pour pouvoir simplement survivre, de surcroît continullement menacés par les acidents de travail ou les expulsions quand on n'a plus besoin d'eux pour faire tourner la machine-Moloch qui les broie vivants.

    Ainsi la "gauche" démocrate ou radicale commence t'elle à jeter le masque de la convention et à prendre conscience qu'inciter les populations du tiers monde à venir s'installer dans des pays où l'on n'a pas besoin d'eux n'est peut être pas un très bon service à leur rendre. Mais que dire alors des exploiteurs et des idéologues à leur service comme Attali ?

    Bien entendu, le cosmopolitisme dans sa version du siècle des Lumières reste t'il un objectif : l' unité du genre humain en passe par là. mais il n'a rien à voir avec le déplacement forcé de pauvres hères qui ne cherchent pas l'émulation culturelle mais la simple pitance de la survie quotidienne.


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  • La crise mondiale financière/boursière/économique qui s'annonce, liée à la probable récession de l'économie américaine qui résulte elle même de la crise des "subprime", sera elle la dernière ? je me rappelle de ce qu'Alain de Benoist déclarait dans un article du "Monde" au moment de la guerre du Golfe il me semble :

    "L'Occident gagnera toutes les guerres sauf la dernière"

    Mais Alain de Benoist , fondateur et führer de la "Nouvelle Droite" , est un pseudo-penseur aux visées obscurantistes profondément inquiétantes ; j'en profite pour souligner que la critique du monothéisme qui se donne cours ici n'entend aucunement faire l'éloge d'un fumeux paganisme ou neo-paganisme sur le modèkle de la Nouvelle Droite.... le polythéisme ne vaut pas mieux que le monothéisme, et d'ailleurs je m'interroge sur le soutien apporté par la nouvelle droite à Roger Garaudy l'islamiste... il est vrai que le "brun" (la ND ) va bien avec le "vert" (l'Islam) comme on l'a vu dans les années 30-40 , concernant  la collaboration du Grand Mufti de Jérusalem avec Hitler.

    Mais on ne peut refuser à Alain de Benoist (non plus qu'à son grand ennemi Bernard Henri Levy) l'art de la formule. Qu'on le veuille ou non, l'époque est à l'Apocalypse (c'est à dire au rêve d'une vérité dernière sur l'humanité avant que celel ci quitte la scène) et à la "fin des Temps".

    H G Wells avait en 1908 écrit un fameux roman , "La guerre dans les airs", où il prévoyait pas mal de conséquences funestes du progrès technique dans les armements, notamment celui de l'aviation : il annoncait une guerre mondiale où l'Allemagne s'opposerait aux puissances anglo-saxonnes (USA, Angleterre), aux côtés du Japon (et le livre avait prévu les opérations kamikaze), une guerre durant 5 ans suivie d'un effondrement de la civilisation "moderne scientifique occidentale" suite à un arrêt brutal de l'économie mondiale à cause de l'impossibilité des échanges, puis d'une panique, de guerres civiles et d'épidémies meurtrières(de peste en particulier).

    Le livre est facilement accessible (Ed folio poche ), mais voici quelques passages saisissants tirés de l'avant dernier chpitre intitulé : "L'effondrement".

    "L'édifice entier de la civilisation se lézardait, croulait et s'anéantissait dans la fournaise de la guerre.

    Les phases de l'effondrement universel où sombra la civilisation scientifique et financière du XX ème siècle se succédèrent très rapidement, si rapidement que sur le raccourci de l'Histoire elles paraissaient se chevaucher...

    Quand d'un coup d'oeil rétrospectif l'observateur réfléchit sur l'activité intellectuelle de cette époque abolie, le trait le plus singulier est cette hallucination de sécurité. Rien ne parait à présent si précaire que l'ordre social dont se contentèrent les hommes du 20 ème siècle...ce n'était pas tant une confiance raisonnée que l'inévitable conséquence du succès persistant (depuis 3 siècles)..."

    Ici on doit noter une différence dans la réalité qui est la nôtre : il y a longtemps que l'humanité ne croit plus au progrès, se défie de l'avenir (avec raison !) et se réfugie dans l'irrationnel du mythe et des croyances.

    Cette différence, bien sûr, en recouvre une autre, qui est de taille : dans la réalité, il y a eu deux guerres mondiales, et l'humanité s'en est relevée, et a poursuivi après 1945, à un rythme accéléré de manière fantastique, son progrès technique et scientifique.

    Mais est ce si sûr ? j'entends par là : le scénario imaginé par Wells d'un effondrement subit de la civilisation doit il être mis hors jeu définitivement ?

    Je ne le pense pas ! déjà au début des années 60, dans le livre bien connu "Le matin des magiciens", Pauwels et Bergier signalaient l'extrême fragilité , dûe à sa complexité même, de la civilisation moderne, démocratique et "scientifique".

    Le titre et la photo de cet article font allusion à la chute de l'aigle nazi en 1945.

    Mais l'humanité d'après guerre a t'elle vraiment rompu totalement avec l'idéologie nazie ? la victoire des prétendues "démocraties" n'est elle pas une victoire à la Pyrrhus ?

    Le trés beau film récent "La question humaine" interprète la violence (économique) de notre modernité contemporaine mondialisée comme trouvant sa visibilité paradoxale et son intelligibilité dans la "lumière fossile de la Shoah", j'en ai fait le commentaire sur l'ancien blog :

    http://www.blogg.org/blog-64760-billet-la_question_humaine__ou_la_lumiere_fossile_de_la_shoah-664822.html

    Certains commentaires rabbiniques du livre de Daniel interprètent le songe de la statue à la lumière des différents empires se succédant dans l'Histoire, qu'un philosophe comme Hegel analyse comme : monde oriental, grec, romain et germanique. L'époque messianique annoncée par les rabbins succèderait à l'effondrement du dernier empire , germanique selon Hegel, occidentale selon la pensée moderne.

    Plusieurs versets se rapportent à ceci , ainsi dans Jérémie :

    "Même si Babel montait jusqu'au ciel, érigeait dans les hauteurs ses puissantes forteresses, des dévastateurs suscités par moi l'atteindraient, dit YHVH"

    Dussiez vous vous élever comme l'aigle et regarder le soleil face à face, je vous précipiterai dans les profondeurs de l'Abîme, oracle de YHVH.

    Mais le judaïsme doit être interprété comme un athéisme, à la différence des deux faux universalismes issus de lui. Je me réfère ici aux thèses de Misrali, le grand commentateur de Spinoza, selon lequel la qabbalah (l'ésotérisme hébraïque) doit être interprétée dans la dimenson d'une immanence radicale ne laissant aucune place à une quelconque transcendance, voire même à Bernard Henri Lévy qui déclare à la fin du "Testament de Dieu" que "le trait caractéristique de la mentalité de l'homme hébreu est l'inexistence radicale de celui qu'il nomme son Seigneur"

    Le "Messie" ("Masshia'kh") ne viendra jamais dans l'Histoire ; tout "messie" pouvant se présenter est un faux Messie, le dernier exemple célèbre étant celui de Shabbatai Tsevi, qui a provoqué en 1666 une cassure en deux du monde juif.

    Philosophiquement ceci est formulé de manière idoine par Badiou :

    "Il n'y aura pas d' épiphanie de la vérité".

    La vérité, qui est la figure philosophique de "Dieu" se rencontre point par point, pas dans une fulgurance poétique ou prophétique. Ou encore, selon les termes de Brunschvicg : "Dieu se rencontre d'esprit à esprit, non face à face". Je note d'ailleurs que le "Dieu de Moîse" lu dit : "tu ne peux me voir face à face et vivre"...

    Alors Wells ? démenti par les faits ou pas ?

    Pour ma part je terminerai (sans finir) sur les considérations suivantes, en appelant à éviter toute tentative de trouver refuge (face à la panique qui nous guette tous, quiqu'on en dise) dans un "avenir radieux" (sur le mode marxiste ou millénariste) ou un passé primordial vers lequel le Temps nous ramènerait après les "tribulations de l'Apocalypse"; je préfure me situer dans le "présent éternel de la réflexion" thématisé par Marie Anne cochet dans son livre sur la conversion spirituelle selon Brunschvicg, voir :

    http://groups.msn.com/Principiatoposophica/philosophie.msnw?action=get_message&mview=0&ID_Message=18&LastModified=4675655639014156283

    "Seule, l'intégration des moments dans le présent éternel de la réflexion peut poser un avant et un après, un passé et un futur... toute connaissance s'exerce dans un inépuisable aujourd'hui. En lui s'insèrent tous les temps, s'évoquent tous les espaces. Et ces espaces infinis qui faisaient trembler Pascal n'ont point à troubler le jugement de la réflexion. Ce jugement les contient. Ils ne le contiennent pas....

    ce jugement du présent éternel ressemble à un miroir profond où d'innombrables images naissent et se pénètrent mutuellement sans s'effacer jamais mais en se modifiant les unes par les autres par des valeurs nouvelles. Ainsi , réfléchi, conservé, transformé, le mirage fluent des sens et des vies s'instaure en un monde spirituel, s'ordonne et s'unifie. Les intelligences s'y succèdent se développant en lui et le développant à leur tour. C'est dans ce monde spirituel que nous trouvons le spectacle offert à notre propre réflexion"
     
     

    Dans cette optique j'interprète la période de 1945 à nos jours comme une "fin qui se prolonge", dans une lumière "spectrale" ; les trente glorieuses 'de la France, de 1945 à 1975) ne sont à mon avis pas si glorieuses que cela.

    Nous rejoignons donc de cette façon la vision grandiose de Wells, une vision terrifiante aussi, notamment quand il évoque certaines péripéties survenant aux hommes de l'après guerre (dans le roman, pas dans notre réalité) s'aventurant à visiter Londres devenue un désert. A la nuit tombée des spectres de l'époque (victorienne) révolue apparaissent aux yeux du téméraire visiteur, qui ne trouve son salut qu'en se confiant au Dieu de la Bible Mort de rire...ce qui rappelle aussi le final du "Récit du vieux marin" de Coleridge, une des plus grands poèmes de tous les temps. Ce qui rappelle aussi le film récent "Je suis une légende" (New york prenant le place de Londres).

    Alain Finkielkraut déclare que nous sommes entrés dans un processus de décivilisation; je suis de son avis, et la prétendue "politique de civilisation" du tandem Sarkozy-Guaino prend selon moi des allures de sinistre farce.

    Le cinéma voit de plus en plus arriver la détresse absolue qui va fondre sur l'humanité des mois et des années qui viennent, je n'en veux pour témoin que l'excellent film récent de Sidney Lumet "Before the devil knows you're dead" que j'avais aussi commenté :

     http://www.blogg.org/blog-64760-billet-sidney_lumet___7h_58_ce_samedi_la__before_the_devil_knows_you_re_dead_-677706.html

    ainsi que le film qui doit sortir des frères Coen : No country for old men (tout un programme ! Mort de rire).

    mais Holllywood n'offre pas d'issue , s'il annonce le désastre qui vient....

    un soldat US de la campagne normande de 1944 parvenait à supprimer sa peur en se considérant comme "déjà mort".

    C'est un peu ce genre de tactique que je propose pour vivre le "mieux possible" les temps troublés qui nous attendent ; en somme une version simplifiée de la doctrine einsteinienne sur l'irréalité du "temps universel" de Newton et de la physique classique:

    "le temps subjectif avec son "maintenant" ne doit avoir aucune signification objective... pour nous, physiciens "dans l'âme", la séparation entre passé, présent et avenir ne garde que la valeur d'une illusion, si tenace soit elle..."

     


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  • Ce film est adapté d'une histoire vraie, bien que selon des personnes bien informées il ne prenne quelques libertés avec la réalité (voir les liens qui seront donnés plus loin).

    Charles Wilson (interprété par Tom Hanks) est un obscur député démocrate, amateur d'alcool et de parties fines (il a comme surnom "Good time Charlie") sur lequel une milliardaire texane fantasque, bigote et obsédée par l'idée de croisade anticommuniste, Joanne Herring (interprétée par Julia Roberts) jette son dévolu afin de l'amener à infléchir la politique de l'administration américaine vis à vis de la guere menée par l'URSS en Afghanistan (nous sommes en 1980, c'est le début des années Reagan).

    Emu par une visite des camps de réfugiés, il dépasse les espérances de sa protectrice et arrive au fil des années à créer de toutes pièces ce qui reste la plus grande opération secrète (secret de polichinelle) de la CIA : subventionner et armer les mudjahiddine (qui plus tard deviendront les talibans) et provoquer la déroute de l'armée soviétique, puis la chute de l'empire soviétique et du rideau de fer, la fin du communisme et donc de la guerre froide par le k-o  total des "rouges" et la victoire totale du "monde libre" ...

    La thèse du film est assez extrême et tend à attribuer à Wilson tous les mérites dans cette "mise à mort" du communisme : mais bien sûr nous sommes à Hollywood, il s'agit de jouer sur le registre dde l'incroyable, à savoir l'influence qu'a pu avoir un obscur petit député dans l'évènement géopolitique majeur de la deuxième partie du 20 ème siècle. Il ne faut pas considérer ce film comme un document historique

    Voci quelques liens pour se faire une idée plus juste des choses, permettant de relativiser (du point de vue historique) :

    sur le film  :  http://en.wikipedia.org/wiki/Charlie_Wilson's_War

    sur le "vrai" Charles Wilson : http://en.wikipedia.org/wiki/Charles_Wilson_%28Texas_politician%29

    sur la "vraie" Joanne Herring : http://en.wikipedia.org/wiki/Joanne_Herring

    qui d'ailleurs possède un site dont je conseille à ceux qui apprécient une bonne séance de rigolade le paragraphe consacré à la foi religieuse ("Faith") ...vous y apprendrez notamment qu'il est facile de surfer sur un arc en ciel, il suffit de se persuader qu'on est en train de le faire Mort de rire:dans le film elle amène Wilson à ses fins en couchant avec lui... je me permets d'émettre quelques doutes là dessus.. si c'était vrai cela au moins serait drôle.... mais les croyants, qu'ils soient bigots ou "sauvés par Jésus du désespoir", comme c'est le cas de Bush et comme cela semble être le cas de cette Joanne Herring, sont tout sauf drôles...ce sont des pitres, mais leur pitrerie ne porte pas à rire...

    http://www.joanneherring.com/

    enfin deux liens plus sérieux (à ce qu'il semble ?) pour faire la part des choses sur le plan historique, et notamment à propos de l'influence (culpabilité ?) de la CIA dans la "création" du monstre Al Qaeda-Ben Laden (thème qui n'est pas abordé franchement par le film, mais seulement de manière implicite et suggestive):

    http://www.americanthinker.com/2008/01/whos_war_separating_fact_from.html

    http://usinfo.state.gov/media/Archive/2005/Jan/24-318760.html

    Passons maintenant aux choses sérieuses, du point de vue de ce blog en tout cas, choses qui ont très peu à voir avec le cinéma, même le "bon cinéma", ou avec les réalités historiques ou géopolitiques.

    Au fond, qu'est ce qui reste "dans la tête" de ceux qui ont vu le film ? quelle est, donc, la thèse qu'entend promouvoir le film ?

    Il est clairement suggéré (et  à juste titre, c'est bien la réalité de ce qui s'est passé) que ce sont les religieux, les évangélistes chrétiens américains fanatiques qui ont instrumentalisé le pouvoir politique afin de mener une croisade anticommuniste en armant les mujahhidine afghans.

    Charles Wilson est présenté dans le film comme un personnage très sympathique (ce qu'il est sans doute, encore une fois ce n'est pas cela qui est l'objet de mes propos) qui n'est pas dupe des motivations profondes de ceux qui l'instrumentalisent , et qui essaye de mettre un frein à leurs obsessions religieuses.

    Il prend conscience (grâce à son "complice" de la CIA Gust Avrakotos (interprété par l'extraordinaire Philipp Seymour Hoffman) du danger qu'il y a à armer ainsi des fanatiques islamiques; pour parer à ce danger, il essaye de persuader la commission, après la déroute de l'armée russe, de voter des crédits substantiels pour reconstruire l'Afghanistan, et surtout ouvrir des écoles afin de former toute cette jeunesse qui forme la majorité de la population. Mais peine perdue... il y a maintenant (au début des années 90) d'autres priorités, la guerre du Golfe, l'aide aux pays d'Europe de l'Est, etc..

    au fond, cela revient à dire que : bien sûr, l'Amérique est gangrenée par des fanatiques religieux chrétiens, bien sûr les américains sont incultes en majorité, ignorant l'emplacement de l'Afghanistan, les réalités de l'Islam, etc...

    mais il y a dans les idéaux américains une part "bonne", incarnée par le personnage de Wilson : et si les décideurs politiques l'avaient écouté jusqu'au bout, l'Afghanistan aurait été reconstruit, la démocratie y aurait vu le jour, et l'islamisme aurait été évité. Le monde parfait, en somme !

    Cette thèse n'a qu'un seul inconvénient, c'est qu'elle est fausse !

    Car en admettant même que des crédits très importants aient été votés, une sorte de Plan Marshall pour la région donc, que des écoles "démocratiques" aient vu le jour pour remplacer les madrasas, quel aurait été l'enseignement dispensé ? celui , ultra-relativiste, qui est dispensée depuis 40 ans ou plus aux USA, qui met par exemple sur un pied d'égalité les mythes peaux rouges sur le peuplement des USA à l'époque préhistorique avec les thèses scientifiques.

    Or le relativisme post-moderne "démocratique" et "tolérant" peut tout dissoudre (et il l'a fait, en tout cas en Occident) sauf une chose : l'Islam.

    l'Islam n'est pas soluble dans la démocratie, comme les "belles âmes" chrétiennes , "antiracistes", pour la "liberté de croyance", de gauche, ou "néo-cons" sont en train de l'apprendre depuis 2001, et notamment en Irak.

    L'Islam, c'est en somme comme le "réel" selon Lacan : c'est ce qui résiste....  aux beaux yeux d'Emmanuelle Béart, BHL  ou Arielle Dombasle ....

    L'inconvénient majeur des thèses de ce film, c'est de ne proposer qu'un faux choix, un choix qui ne peut que favoriser (s'il en était encore besoin) le nihilisme occidental profond , la plaie de notre époque : le choix entre le fanatisme religieux (dépeint par nous sous l'étiquette "Dieu d'Abraham") et l'athéisme post moderne, à base de relativisme sceptique et de multiculturalisme "tolérant, universaliste et démocratique"  : réalise toi, c'est tout ce qui compte, tout est vrai donc tout est faux, ce qui seul importe est de réaliser ses désirs en accord avec la loi de tous et les sacro-saints "droits de l'homme", chacun est libre de croire ce qu'il lui plait de croire, et de faire ce qu'il lui plait de faire en accord avec les lois et la libre entreprise...."we are in a free country", "it's a free world"

    et pour le reste "jouissons sans entraves", "boire un petit coup c'est agréable mais il ne faut pas rouler dessous la table" etc..etc.. etc..ad nauseam !

    en somme : ce que Nietzsche (mais Nietzsche est encore trop chrétien à nos yeux, ne serait ce que dans ses vociférations anti-chrétiennes) dépeignait comme le "dernier homme qui sautille sur la Terre trop étroite en clignant de l'oeil"... ou ce que Badiou (mais Badiou est encore trop chrétien à nos yeux, ne serait ce que dans son athéisme) thématise comme le "matérialisme démocratique".

    Or ce sera toujours le Dieu d'Abraham qui gagnera face au relativisme démocratique et multiculturaliste, pour une raison bien simple : la gueule de bois ne donne aucun sens à la vie, la prière cinq fois par jour si  !

    conclusion : concluez vous mêmes !

    et si vous croyez que l'Islam pratiquera la tolérance multiculturelle....

    Tout le sens de notre entreprise, c'est de définir une autre voie pour ceux qui ne veulent pas de ce choix imposé et truqué... une voie qui n'est pas celle du matérialisme dialectique de Badiou...oh pardon, il dit "dialectique matérialiste" .

    On ne sort du besoin de "prier" comme du besoin symmétrique de boire ou de "grimper aux rideaux", que si l'on sort du dilemne entre "la vie ayant un sens" et "la vie où le vide n'est pas comblé" : et cette sortie, qui est "la sortie hors de la religion qui est la sortie de la religion" , ne se fait que si l'on échappe au besoin d'un sens tout fait, donné de l'extérieur, par une autorité d'En Haut, en s'établissant fermement et entièrement dans ce qui donne toute notion de sens ou de non-sens, dans la source de tout jugement donc : l'Intellect.

    C'est ce que nous appelons le "Dieu des philosophes et des savants", qui ne se rencontre pas en "face à face" mais d'esprit à esprit...qui ne se rencontre pas du tout donc, et qui n'intervient en aucun cas dans l'Histoire ou dans l'Espace -Temps.

    Que veut dire, en somme, "faire la volonté de Dieu" ? en aucun cas prier ou obéir à des interdits ou impératifs bizarres , qu'ils soient "moraux", sexuels ou alimentaires... mais simplement : travailler au travail infini de la Raison, dans la science et la philosophie, la philosophie qui n'est autre que la science des sciences, ou encore la Raison réfléchissant sur elle même et prenant conscience d'elle même comme étant "toute réalité" (Hegel), en un acte de connaissance intégrale selon les termes de Léon Brunschvicg.

    En attendant, ils ont gagné, les petits gnômes qui sautillent en clignant de l'oeil et en buvant un coup, par exemple au Fouquet's ou sur le yacht en compagnie de la belle Carla Bruni,  ou bien qui s'agenouillent ou se mettent les fesses en l'air pour prier un "Dieu" transcendant (donc imaginaire) auquel on se "soumet" pour qu'il vous donne la victoire sur "ceux d'en face" qui le prient sous un autre nom (il y a une phrase qui vaut son pesant d'or dans le film, au moment où ils donnent aux Afghans des armes très sophistiquées : "Dieu est de notre côté ! " suivi de "et si un jour il est des deux côtés ?").

    Oui, ils ont gagné, et la Terre est maintenant entièrement soumise au Mal et livrée aux démons, que ceux ci soient de l'Est ou de l'Ouest....


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  • Les lignes suivantes sont extraites de l'excellent livre de Bernard Rousset : "La perspective finale de l'Ethique et le problème de la cohérence du spinozisme" (Vrin reprise):

     "il ne saurait être question d'attendre quoi que ce soit d'une illusion salutaire : la formule est une contradiction, puisque l'illusoire ne peut nous sauver réellement de rien, et qu'il n'a d'autre résultat que la dé"sillusion; seul le vrai est salutaire"

    (un autre a dit, plusieurs siècles avant Spinoza : "la vérité vous rendra libres")

    "Or il n'y a ni vérité assurée ni salut possible dans la simple croyance, dans la confiance de la foi : en dehors de la vérité rationnelle parfaitement comprise dans son contenu comme dans son fondement,  il n'existe que l'afirmation gratuite qui est capable de poser le faux comme le vrai, le mal comme le bien; même si elle rencontre le vrai et le bien, la croyance en tant que telle, parce qu'elle ne sait pas lucidement ce qu'elle pose ni pourquoi elle le fait, restera tojours instable et inquiète, et cela d'autant plus qu'elle admettra en son objet du mystérieux, dont elle ne sait quoi attendre"

    A n'en pas douter, il faut voir là l'origine du fanatisme religieux : il est faux que la "crainte soit le commencement de la sagesse" !

    Aussi avons nous l'obligation (nous hommes du 3 ème millénaire), si du moins nous voulons survivre, de substituer aux religions, à toutes les religions, qui sont toutes entachées de "mysterium tremendum" et de transcendance, ainsi que de reliquats de superstitions ethniques, même celles qui se prétendent "universelles", par l'unique religion de vérité, la relgio philosophica : religion en tant que lien entre tous les hommes, seul à même d'assurer et de fonder enfin l'unité du genre humain, en quoi Brunschvicg voyait le but indépassable de la poursuite de la sagesse.

    Le même Brunschvicg souligne de façon lumineuse une certaine dissymétrie dans les affaires et les conduites humaines qui explique pas mal de choses : si les principes de symétrie sont si importants en physique, les dissymétries le sont tout autant pour la compréhension du quotidien... voici ce que Brunschvicg observe : il est humain de fuir, et donc de tourner le dos, ce que l'on redoute; qui fuit tend à s'éloigner de ce qu'il fuit, et s'il s'en éloigne il est bien évident qu'il sera incapable de vérifier et de scruter vraiment l'objet de sa crainte (révérencieuse, "sacrée" ou profane). Il est donc établi que le "mystère" va de pair avec la peur. Réciproquement, l'admiration, la révérence, s'accompagne du plaisir de contempler, de chercher à connaitre....il est donc certain aussi que la "crainte révérencieuse" (c'est à dire la crainte comme commencement de la Sagesse, "reshit Hokmah" en termes bibliques) est une contradiction dans les termes.

    La connaissance, la véritable connaissance, issue de la libre recherche de la vérité et du libre exament au moyen de la Raison, impliquera toujours de scruter pateimment l'objet à connaitre en changeant de point de vue, ce qui implique sans doute les fameux principes de symétrie de la physique et aussi de la philosophie fondamentale : une symétrie consiste en une certaine invariance de l'objet contemplé selon des orientations diverses. Elle impliquera aussi , (puisque le changement provoqué et exploré du "point de vue" passe par la diversité des approches, et quelle meilleure diversité que la diversité des chercheurs ? ) l'intersubjectivité, la recherche en commun de la vérité, d'où nait le véritable amour entre les hommes, qui n'a rien à voir avec l'amour "sexuel" ou romantique (que je ne cherche pas à éliminer, mais seulement à situer dans sa véritable perspective).

    Mais continuons avec le texte de Bernard Rousset :

    "Il est aussi illégitime d'espérer le salut d'une réalité extérieure ou transcendante: en effet, loin d'être certains de la possibilité de notre salut, nous dépendrions à cet égard d'un terme dont le décret nous échapperait; qui plus est, l'objet de notre aspiration risquerait de ne pas répondre exactement et pleinement au désir de notre nature, en sorte que sa possession serait encore l'expérience d'un manque; enfin, il ne nous serait donné que sur le mode de l'attente et de l'absence; par rapport à lui, notre vie resterait nécessairement malheureuse"

    Or l'objet de la quête philosophique doit nous procurer une joie continue et souveraine : science comme philosophie est incompatible avec la crainte, le tremblement ou le malheur de la conscience ...

    "il est en outre indispensable que nous ne placions pas en l'absolu tout ce qui satisfait les caprices et les passions qui nous déchirent, et que nous ne retrouvions pas en Dieu tout ce qui nous gêne en l'homme : l'anthropocentrisme et l'anthropomorphisme sont apparemment des solutions faciles au problème du salut, trop faciles même dans la mesure où l'on se donne ce qu'on cherche; mais en réalité, outre la fausseté de ces fictions, l'homme reste alors prisonnier, ou se rend encore plus prionnier de ce dont il prétend vouloir se libérer, le décret arbitraire et le sentiment subjectif portés à l'infini....

    seule la vérité objective de l'immanence se possédant elle même en toute certitude rend le salut possible"

    Les religions anthropomorphiques que sont les religions abrahamiques sont ici jugées : un "Dieu" dont le décret arbitraire déciderait de qui est "sauvé" (agréé) et qui est rejeté, un tel Dieu ne saurait satisfaire l'exigence de la Raison et de l'autonomie. A contrario, le spinozisme apparait ici dans sa splendeur de rationalisme absolu, bien différent du rationalisme cartésien laissant place au mystère en ce qu'il établit l'infini comme hors de la portée de la compréhension humaine rationnelle (en son essence toutefois, car l'existence de Dieu est établie de manière rigoureusement intelligible par les fameuses "preuves").

    Spinoza est le véritable inspirateur de Brunschvicg comme d'Einstein, bien plus que Descartes ; mais l'on doit tout de même admettre que sans Descartes, pas de Spinoza, et donc pas d'Einstein. Telle est la longue chaine de la Raison....

    à noter d'ailleurs que Thibault Damour, dans son livre formidable "Si Einstein m'était conté" , évoque le caractère admirable, dans sa simplicité même, du premier article fondateur d'Einstein en 1905, celui issu de l'illumination de Mai 1905 et qui fondera la relativité restreinte. On trouvera cet article (en allemand) avec les trois autres de l'annus mirabilis 1905 (où sont en germe la physique quantique comme la relativité ou le mouvement brownien) à cette adresse :

     

    Voici ce que dit Thibault Damour :

    "ce court article d'Einstein est l'un des plus importants articles scientifiques du 20 ème siècle. C'est aussi l'un des plus beaux; il a une perfection axiomatique digne des traités de géométrie euclidienne qu'Einstein enfant avait tellement appréciés. Sa logique se déploie sans efforts apparents, comme certaines des plus belles pages de musique de Mozart"

    Il aurait pu aussi citer Spinoza, et le mot "euclidien" doit nous alerter dans cette citation de Damour : on sait que la forme axiomatique de l'Ethique est tout entière euclidienne. On sait aussi que les grands philosophes classiques évoqués ici avec admiration (Descartes, Spinoza, Leibniz, Kant) sont dépendants de la forme "classique" de la science (mathématico-physique), celle qui existait justement avant la révolution du vingtième siècle marqué par la relativité et la physique quantique, révolution dont nous ne sommes pas encore au bout, comme en témoigne le livre de Smolin "Rien ne va plus en physique" lui aussi analysé ici.

    En physique, cette forme "classique" de la pensée scientifique trouve son achèvement dans la physique newtonienne puis dans la beauté formelle et la rigueur conceptuelle de la mécanique lagrangienne et hamiltonienne. Elle est venue remplacer la physique d'Aristote, à partir du 17 ème siècle et des travaux de Galilée.

    En mathématiques, logique et philosophie, elle est celle de l'axiomatique euclidienne, dont Spinoza s'inspire pour donner un cadre à son Ethique. Là ce sera l'apparition des géométries non euclidiennes au 19 ème siècle qui donnera le signal du renouveau, puis leur utilisation par Einstein au 20 ème siècle dans la relativité générale.

    Voici d'ailleurs l'hommage qu'Einstein rend à Newton, dans un passage écrit à la fin de sa vie ("Eléments d'autobiographie") :

    "Newton, pardonne moi; même pour un homme doué de ton incomparable puissance de réflexion et de création, il n'y avait à ton époque qu'une seule voie possible : tu l'as trouvée"

    Il n'y avait qu'une voie possible parce que les géométries non euclidiennes n'étaient pas encore inventées, et parce que l'humanité du temps de Newton avait encore un pied dans le Moyen Age et son système du Monde envisagé à travers les sphères planétaires concentriques, mues par des Intelligences célestes. système si rassurant pour l'âme .... la postulation par Newton d'un temps et d'un espace "absolus et mathématiques" (formalisés dans les "Principia mathematica") donnaient à la nouvelle physique des instruments théoriques d'une puissance encore inégalée, à même de faire franchir à l'intelligence le "cap", et de l'affranchir du cadre aristotélicien et scolastique.

    Or si l'on prend maintenant au sérieux la thèse (qui sous-tend toutes les recherches menées ici) selon laquelle la philosophie a pour "condition" la science, c'est à dire a besoin de la science piour se développer en se différentiant d'elle tout en l'assumant, alors la philosophie qui prendra la suite de la philosophie classique n'est pas encore née !

    Bien entendu certains diront qu'elle existe, et que c'est celle de Badiou, qui s'établit sur les découvertes cantoriennes et sur celles de Grothendieck et Lawvere dans la théorie des topoi. Mais nous ne saurions accepter cette affirmation, car Badiou fait largement l'impasse sur la physique : il n'a rien à dire sur la relativité, pas plus que sur la physique quantique.

    Et comment le pourrait il d'ailleurs, puisque selon le mot de Feynman : "si vous avez compris quelque chose à la physique quantique, c'est que vous n'avez rien compris à la physique quantique ! "Mort de rire

    Smolin assigne comme tâche à la physique du 21 ème siècle l'un des cinq grands problèmes qu'il énonce, le plus important sans doute, et qu'il appelle celui des fondements de la physique quantique.

    Il s'agit en fait de parvenir à une compréhension philosophique,  parfaitement rationnelle, de ce qui de nos jours reste obscur et imparfaitement intelligible (si maniable parfaitement et vérifiable par des calculs) . Et ce problème va de pair avec celui d'un assomption sous une théorie unifiée de la relativité et de la gravitation avec le quantique et les trois autres interactions.

    Brunschvicg ne pensait pas autre chose quand en 1941-44 il étudiait avec admiration les travaux de ses élèves (comme Lautman) en relation avec la physique quantique encore dans les limbes (philosophiquement en tout cas), qu'il admettait ne pas comprendre totalement. Mais hélas l'armée hitlérienne nous a ravis Lautman comme Cavaillès, ces deux penseurs exceptionnels issus de l'enseignement de Brunschvicg.

     

     

     


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